FICHE TECHNIQUE | |
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Parution | 01/12/2011 |
Rayon | |
Collection | Le bulletin juridique du praticien hospitalier |
Format | 0x0 mm |
Nbre de page | 0 pages |
Le Bulletin juridique du praticien hospitalier
numéro 143, décembre 2011
A propos du normal et du pathologique
Georges Canguilhem a longuement discouru sur ce thème fondamental en médecine. On soigne la pathologie que l’on définit par rapport au normal. Or qu’est-ce que la normalité ? Selon les temps, selon les cultures, les définitions ne sont pas les mêmes. La maladie n’est-elle pas une norme ? Bref, on peut ratiociner jusqu’à plus soif sans que l’on puisse conclure. Or chacun sait que l’art du médecin est justement de conclure. La décision médicale fait partie de la qualité du thérapeute. Si l’art du philosophe est de poser des questions, le médecin ne s’en contente pas : il doit questionner et décider. Si le gestionnaire échafaude un dessein pour plusieurs mois, voire plusieurs années, le médecin doit agir hic et nunc : la maladie n’attend pas pour être combattue. Si le juriste s’efforce de trouver la solution commune pour organiser la vie sociale, le médecin traite cas après cas : l’un pense collectif, l’autre individuel. Que dire de l’économiste qui chiffre et conclut selon les coûts, et le médecin qui soigne sans réserve des coûts ? La césure est totale.
De tout cela naît une incompréhension entre les uns et les autres. Peut-on arriver à une synthèse ? Outre que cela apparaît peu probable, elle s’apparenterait à un syncrétisme stérile. Chacun doit comprendre l’autre sans s’affadir à vouloir être l’autre. Le médecin ne sera jamais juriste, sauf à ne plus être médecin, et inversement.
La médecine tient à son interprétation scientifique, mais son épistémologie doit être mise en perspective avec les autres disciplines. En conséquence, la pathologie serait dans l’absence d’identité. Rien ne serait plus néfaste pour la médecine que le médecin veuille épouser les autres grandes catégories scientifiques ; mais il a besoin des autres… Ne pas le reconnaître, c’est passer du normal vers le pathologique.