FICHE TECHNIQUE | |
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Parution | 01/05/2010 |
Rayon | |
Collection | Le bulletin juridique du praticien hospitalier |
Format | 0x0 mm |
Nbre de page | 0 pages |
Le Bulletin juridique du praticien hospitalier
numéro 128, mai 2010
La vérité
Voici un mot qui suscite bien des propos, surtout lorsqu'il
s'agit de malades et de maladies. Cela n'est pas nouveau :
tous les philosophes sont devenus maître en sagesse en
parlant de ce thème redoutable : la vérité. Les grandes
religions - et surtout le christianisme - a placé la vérité
au-dessus de tout. Un très grand théologien français, Nicolas
Malebranche, a écrit, au XVIIe siècle, plusieurs centaines de
pages d'une très grande profondeur sur la recherche de la
vérité : est-ce anodin ?
Comment la vérité serait-elle différente dans la relation
médecin-malade ?
La vérité en médecine est plus cruciale et difficile à dire au
malade que dans une quelconque autre relation car pour le
patient sa vie est en jeu.
La vérité exige, en préalable, de ne pas dire des mensonges ;
mais en son nom, doit-on tout révéler de l'état du patient ?
Soit à lui-même ? Soit à ses proches ? Cela devrait être le cas ;
or la vérité suppose que l'on connaisse précisément ce qui va
se passer, ce qui n'est jamais totalement le cas en médecine.
Même lorsque le pronostic est sombre, jamais l'inéluctable ne
peut être daté. Dire qu'une situation est sombre est différent
que d'annoncer la fin prochaine.
La vérité exige une certaine empathie envers le malade, cela
n'est pas simple et suppose une très grande réflexion sur
soi-même. Ne dites pas à autrui ce que vous n'auriez pas
aimé ce que l'on vous dise, pour paraphraser Emmanuel
Kant, qui appliquait ce principe à la liberté. Or souvent autrui
est plus âgé et toujours en état d'infériorité. La relation
médecin-malade est de fait déséquilibré au bénéfice du
sachant ; là réside la part immense de la responsabilité du
médecin. Si le malade la sollicite, la vérité sur son état doit
lui être révélée avec tact et mesure, selon l'expression
consacrée, c'est-à-dire en tenant compte des incertitudes de
tout diagnostic et de la psychologie de l'interlocuteur. Seule la
vérité permet d'être à la hauteur de l'espoir que place le
patient dans le médecin, peu importe que cette vérité soit
partielle ou imparfaite, seule la volonté de la dire compte. La
vérité ne peut se comptabiliser, elle est ce que doit être
l'humanisme médical, c'est-à-dire pleine de nuances.